« De sas en sas », un long métrage de fiction de la réalisatrice franco-algérienne Rachida Brakni sur les conditions d’accueil dans les prisons françaises décriées par des proches des détenus, a été projeté samedi à Alger dans le cadre du 18e Festival culturel européen en Algérie.
Sorti en 2016, ce drame de 82 minutes inspiré d’une histoire véridique vécue par la réalisatrice, dépeint les souffrances d’un groupe de femmes qui se croisent dans une prison pour rendre visite à leurs proches.
Au malheur de leurs enfants, époux, pères ou frères incarcérés, s’ajoutent les tracasseries administratives et le comportement méprisant des gardiens des lieux. Une situation devenue infernale pour ces femmes qui doivent prendre leur mal en patience pour atteindre le parloir.
A l’écran, Nora, rôle campé par l’actrice française Zita Harnot, en compagnie de sa mère Fatma, incarné par la chanteuse algérienne Samira Brahmia, se prépare à rendre visite à son frère qu’elle n’a pas revu depuis six mois à la Maison d’arrêt de Fleury-Mérogis (France). Sur place, elles croisent d’autres femmes, venues voir un membre de la famille ou un compagnon.
La porte de la prison franchie, les visiteurs sont soumis à une série de fouilles minutieuses avant de progresser vers le parloir, cette tribune d’expression si difficile à atteindre. Devant l’intransigeance des surveillants qui appliquent scrupuleusement le règlement, ces femmes aux « nerfs fragiles » parviennent toutefois à faire passer des produits « prohibés » comme celle qui a dissimulé une barre de chocolat dans son foulard pour son mari.
A l’attente qui se fait longue s’ajoute la canicule et la soif qui irritent ces femmes, enfermées dans la salle d’attente. C’est dans ce « huis clos » qui symbolise l’enferment que le film évolue en frôlant les codes du théâtre pour traduire à l’écran un scénario dérivé d’une histoire vécue en 2003 par la réalisatrice elle-même.
Pour accentuer les traits de cet enfermement, Rachida Brakni a opté pour des plans serrés dans les différentes scènes du film notamment celles qui se déroulent dans la salle d’attente, le couloir et le parloir. Mené par des actrices au talent avéré à l’instar de Zita Harnot, Fabienne Babe ou encore Meriem Serbah, « De sas en sas » se distingue par un dialogue « subtil » et « authentique » entre professionnels et amateurs.
Salué par les spectateurs, le film déjà primé en 2016 au Festival international du film de Belfort (France) dénonce, en filigrane, les conditions d’accueil « désobligeantes » des proches des détenus.
Présente à la projection, Samira Brahmia a précisé que le tournage du film qui a duré « cinq semaines » a été effectué en France dans un asile psychiatrique où la réalisatrice a planté les « décors suggérés de la Maison d’arrêt de Fleury-Mérogis ».
En réponse à une question sur des « scènes de violence », Samira Brahmia s’est défendue de l’idée de faire des « clichés sur les immigrés » en expliquant que la colère des femmes est motivée par le souci (technique) de « se battre pour défendre le droit de parole et s’extirper des quatre murs de la prison ».
Des projections de films, expositions, ateliers d’écriture et de design, des concerts de musique et bien d’autres animations sont au programme du 18e Festival culturel européen en Algérie qui se poursuit jusqu’au 24 mai à Alger et Bejaïa.
Une vingtaine pays membres de l’Union européenne (UE) dont l’Italie, l’Allemagne, le Portugal, l’Autriche et la France participent à ce rendez- vous annuel organisé depuis 2000 par la délégation de l’UE en Algérie.