J e ne suis pas de ceux qui dînent du mensonge et soupent du scandale. Me dépersonnaliser pour quérir éloges, louanges et flatteries, non merci. Verser dans des discours victimaires, seulement pour le théâtreux que je serais devenu, des sympathies et des jérémiades forcées viennent pleurer mon sort, non merci. Inciter au blasphème, proférer des insanités, commettre des impiétés, seulement pour revenir et pousser des chastes soupirs, alors que dans l’art de se dédire, j’aurais été le premier parmi les fourbes, non merci. Accuser le monde entier, voir en eux les instigateurs, les incitateurs et les inspirateurs de mon triste sort, seulement pour que des esprits naïfs viennent au secours de mon âme en délire, non, ne point vous pervertir.
Je préfère mourir dans la solitude des écrivaillons et des écrivassiers abscons, pour qui les défaveurs du destin n’attireront aucun discours laudateur. Je préfère finir mes jours dans l’oubli de ceux que ma pensée laissera dans l’indifférence la plus absolue. Je préfère tout cela aux gloires faites de glaise et d’argile, aux lauriers façonnés des mains des marionnettistes. Car lorsque la vérité pleuvra, lorsque son eau commencera à sourdre, elle lavera l’affront de tout ce que j’aurais édifié dans le mensonge et la duperie. Ce jour-là, ceux qui auront pris l’histoire pour juge me condamneront à l’effacement, au néant et au non-être de tous ceux qui, leur nom n’aura été pour l’humanité qu’une avanie, une arnaque et une escroquerie intellectuelle.
