Découvrons les 31 phares algériens avec les photos de Zinedine Zebar qui s’est baladé le long des côtes, des frontières avec la Tunisie jusqu’à celles du Maroc, en barque ou à pied et même en hélicoptère. Un beau livre est en préparation chez Casbah éditions pour septembre, avec des textes du journaliste et auteur Mohamed Balhi. Ici, Zinou, le photographe, commente ses images. Suivons le guide :
L’idée de travailler sur les phares m’est venue à Annaba. Au bout d’une jolie promenade, je suis tombé sur ce beau phare du Cap de Garde, à l’ouest de la ville, qui date de 1908. Je me suis dit : pourquoi ne pas faire une série de photos sur les phares en Algérie ? C’est un beau patrimoine à l’abandon, et je ne comprends pas pourquoi on n’organise pas des visites, des itinéraires pour découvrir ces merveilles.
Les premiers phares construits en Algérie sont à l’ouest, du fait des besoins militaires de la conquête coloniale. Ensuite, on a construit des phares de l’Est. En 1861, le premier phare a été construit à Ténés (Chlef), plus précisément à Sidi Merouane, presque au centre de nos côtes. Aujourd’hui, c’est l’Office national des signaux maritimes qui gère la majorité des phares, d’autres sont sous la responsabilité de la marine militaire.
Le phare de Cap Caxine, à Aïn Bénian (ouest d’Alger), est un beau bâtiment. Mais regardez autour, sur cette côte, le nombre de constructions illicites ou anarchiques qui défigurent le site. C’est aujourd’hui un supposé musée où sont exposés les matériels, les vieilles radios, les outils du phare. A l’intérieur, il y a des chambres très belles (occupées jadis par le responsable du phare et ses employés), on pourrait même en faire un superbe hôtel. Mais il est interdit d’accès au public ! Il vous faut « l’autorisation », comme toujours.
J’ai pris des photos de certains phares depuis une barque, car l’accès était difficile ou pénible, comme celui-ci, mon préféré. Le Cap de l’Aiguille se trouve à Cristel, à l’est d’Oran, au bout d’une falaise et il faut marcher longtemps pour l’atteindre. Il est placé sur un site magnifique, ouvert sur un beau panorama. Cristel est un ancien port colonial de pêche : les colons sont partis, les pêcheurs sont toujours là, mais il n’y a plus de poissons ! Il y a même, encore, des rails qui montent de la plateforme d’accostement vers le phare pour transporter, à l’époque, le ravitaillement et le matériel. Et il y a encore pas longtemps de ça, des touristes espagnols y accostaient pour admirer la bâtisse. On pouvait même y loger les visiteurs dans des petites maisons attenantes au phare. Mais elles ont été détruites depuis.
Le phare du Cap Carbon à Béjaïa est le plus haut phare du monde par rapport au niveau de la mer (220 m) et c’est, en plus, une magnifique bâtisse. Ce qu’on ne sait pas c’est qu’il est doublé d’un petit phare, en bas de la falaise, qui sert à le relayer en cas de panne.
Sur les îles Habibas (Oran), j’ai pu travailler dans ce phare grâce aux militaires de la marine qui m’ont accompagné. L’accès est très réglementé parce que c’est un site naturel très fragile, abri des oiseaux migrateurs et d’une beauté incroyable. Il y a quelques temps, on pouvait y accéder librement, mais l’incivisme de certains visiteurs a poussé les autorités à en limiter l’accès. C’est désormais un site protégé. Il a, d’ailleurs, souvent été difficile pour moi de prendre des photos, parce que les gardiens qui sont en poste dans ces phares m’en refusaient l’accès.
A Dellys (Est d’Alger), le phare du Cap Bengut, ou « Bordj el Fnar », datant de 1881, a été abîmé par un attentat en 1994 et a été ensuite fragilisé par le séisme de 2003. Un nouveau phare a été construit à côté dans les années 2000 par une société bosniaque.
Le phare de l’Amirauté d’Alger n’a plus de fonction maritime, il a été transformé par l’armée en poste de télécommunication. Il est, relativement, en bon état. Regardez au pied du phare : au sein de la construction arrondie et surmontée de tuiles, il y a une ancienne synagogue, encore en bon état ! Et juste à côté, une petite mosquée fréquentée par les militaires de la marine aujourd’hui. En fait, ce phare d’Alger a une longue histoire, qui commence avec les Phéniciens et se poursuit durant la Reconquista. C’était une partie du Penon espagnol que les Barberousse avaient détruit.
Ce portfolio a été publié dans El Watan Week-end