L’ECONOMIE ALGERIENNE A LA CROISEE DES CHEMINS

L’ECONOMIE ALGERIENNE A LA CROISEE DES CHEMINS

L a forte chute du prix du pétrole (divisé par deux en moins d’une année) a mis, à nouveau, en exergue les vulnérabilités de l’économie algérienne pour qui le secteur des hydrocarbures représente un tiers du PIB, près des 2/3 de ses recettes fiscales et plus de 95 % de ses recettes d’exportation.

Mais il convient d’être clair : la baisse du prix du pétrole n’est pas la cause de la crise mais en est le révélateur. Refuser cette évidence, c’est aussi refuser la remise en cause d’un modèle économique et de croissance obsolète basé sur la rente pétrolière et gazière et la dépense publique.

Il y a néanmoins des éléments d’optimisme. Le pays se trouve encore dans une situation relativement confortable et dispose de marges de manœuvre sur les plans extérieur et budgétaire :

– Nos réserves de change se situaient à $ 159 milliards à la fin juin 2015
– Les disponibilités du Fonds de Régulation des Recettes (FFR) étaient de DZD 3441 milliards à la même période
– Notre dette extérieure est marginale à $ 3.3 milliards
– Notre dette publique interne est faible à environ 8 % du PIB

Mais ces marges de manœuvre, bien réelles, ne doivent surtout pas être avancées pour justifier un Statu quo et ne rien faire. Le pays a l’opportunité de mettre en œuvre des réformes progressives, pour en atténuer le cout social, mais ne rien faire serait une attitude suicidaire vis-à-vis des générations futures.

Comme disent les anglo-saxons « action is the name of the game » et il apparait comme urgent d’accélérer le rythme des réformes pour atteindre les objectifs que tout le monde connait et partage :
– Atteindre une croissance plus forte et plus pérenne
– Construire une compétitivité accrue
– Développer une économie plus diversifiée dans ses productions et ses exportations
– Promouvoir une création d’emplois plus importante

Mais comment y parvenir ? Comment engager les « longs virages » et les réformes de grande envergure pour la transformation en profondeur de notre économie évoqués par l’initiative NABNI ?

Plusieurs chantiers de court et de plus long terme, bien que non exhaustifs, sont à privilégier.
Un programme ambitieux et volontariste d’assainissement de nos finances publiques, actuellement non viables, et s’articulant autour :
– D’une meilleure maitrise des dépenses courantes qui ont doublé entre 2008 et 2014
– D’une refonte progressive mais totale du système de protection des populations les plus vulnérables.

Actuellement, les subventions et transferts sociaux représentent entre 25 et 30 % du PIB. Ils sont donc couteux et souvent mal cibles et souvent injustes. De plus, ils induisent une forte demande d’importation du fait de l’insuffisance de l’offre locale et une consommation excessive d’énergie et génèrent des « superprofits » pour certains importateurs qui ne répercutent pas toujours aux consommateurs les baisses de prix observées sur le marché international.

On peut comprendre que l’agenda économique ne cadre pas toujours avec l’agenda politique mais il souhaitable de rapidement remplacer le subventionnement des produits par un dispositif mieux ciblé de transfert monétaire direct pour mieux protéger les plus pauvres
– D’une meilleure efficacité de l’investissement public

La relance de la production et des exportations dans le secteur des hydrocarbures. Cette question est primordiale car le repli de la production d’hydrocarbures est avéré. La banque d’Algérie évalue à environ 25 % la baisse de la valeur ajoutée du secteur des hydrocarbures sur le période 2006-2013.

Les chiffres de production annoncés pour 2014 sont en très légère hausse mais la Banque d’Algérie constate néanmoins « la poursuite de la contraction des quantités exportées » de 1.74 % en 2014. Une telle relance passe par un accroissement significatif de l’effort d’exploration, le respect , notamment par Sonatrach , du calendrier de mise en production des nouvelles capacités de production après leurs découvertes, la disponibilité des canalisations et autres moyens de transports des hydrocarbures produits.

L’accroissement des volumes exportés passe aussi par une substantielle rationalisation de la consommation locale. Pour mémoire l’Algérie consomme localement environ 50 % du pétrole qu’elle produit et environ 35 à 40 milliards des 135 milliards de M3 de gaz produits. Il revient aux spécialistes de s’exprimer sur les voies et moyens à déployer pour prendre en charge cette question sensible. Beaucoup pense que « l’après pétrole » se joue dans le pétrole et je suis de ceux là. Il est aussi certain que les dispositifs d’économie d’énergie et les énergies renouvelables disposent d’un bel avenir chez nous.

L’amélioration du climat des affaires. Ce volet est « at the top of the agenda » des autorités mais force est de constater que malgré quelques améliorations récentes le climat des affaires reste lourd et contraignant chez nous. Un environnement réglementaire complexe et des processus longs et compliqués sont à la genèse de tout cela.

L’élargissement du secteur privé, la facilitation de ses investissements et la promotion de l’entreprenariat sont des facteurs puissants pour la génération d’un nouveau « moteur de croissance ». Facilitons la création d’entreprise et encourageons la promotion de l’innovation technologique et méthodologique et la formation innovante !

La construction d’une attractivité plus grande pour les investissements étrangers qui sont cruciaux pour le transfert de savoir faire et de technologie. Cela passe, sans aucun doute, par la révision de certaines restrictions et contraintes actuelles.

L’amélioration de la Gouvernance. Deux fléaux méritent une attention particulière : la bureaucratie et la corruption. La simplification (« streamlining ») de toutes les procédures administratives est souhaitable mais aussi possible si l’Etat relève avec conviction le défi du numérique. Ensuite le recentrage de l’appareil administratif pour développer une nouvelle philosophie du service public. Une administration recentrée sur les exigences du terrain et la satisfaction des besoins des entreprises et pour laquelle écoute, accompagnement, information et communication sont les maitres mots. Le texte réglementaire ne doit plus être l’interdit mais doit tracer des manières de faire, promouvoir les innovations et les initiatives.

L’amélioration des ressources humaines. La mise en adéquation des qualifications au travers d’une politique consciente et organisée de promotion et d’amélioration des compétences professionnelles est un « must ».

L’Algérie est à la croisée des chemins. Notre pays dispose d’un immense potentiel. Pour sa réalisation, c’est l’ensemble de la société qui est concerné. Les forces vives du Pays – ce n’est pas un vain mot : il doit prendre consistance.

Le citoyen ne doit pas abdiquer, laisser à d’autres « le soin de nous en sortir ». Nous avons tous un rôle à jouer.

Comptons sur Nous …….Comptons nous !

RACHID SEKAK

‪#‎Article‬ paru dans le N°3 de Djazair Magazine

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