U n spectacle ambitieux et plein mais produit avec une économie de moyens de textes astucieux et instructif qui mêle amour et histoire en mettant en scène quelques acteurs passionnés qui se démultiplient pour faire résonner la voix et vivre l’âme de la Casbah, joyau de l’art médiéval de l’Algérie. En effet, plusieurs arts se conjuguent pour faire parler chacune des pierres de cette citadelle aux rues labyrinthiques qui surplombent le port et la baie d’Alger la blanche.
Qui mieux que Mohamed Abdenour, dit « Ptit Moh » pour déclamer en musique les secrets de cette merveille architecture chargée de l’histoire de l’humanité, de la convivialité, de partage et de la solidarité et qui d’autre part a servi de lieu géocritique et libéré le peuple algérois du joug colonial. Mélodique, rythmique et harmonique. On aura droit à un spectacle complet où « Ptit Moh″ jouera sa partition de musique tantôt impérieuse pour les grandes conjurations, soit pour dire la situation socio-historique ; ou fictionnelle, voire factuelle, associant le chant, les instruments; la mandole, bango, violon, derbouka, guitare, flûte et tambourin, enfin un amour solennel pour rendre un vibrant hommage à l’Algérie, à Alger et ses splendides quartiers.
C’est le message à retenir dans lequel le déclamateur affirmera son amour à la Casbah. Et de quelle manière ? Puisqu’à vrai dire, il ressuscite les grands maîtres précurseurs du Châabi, tel que : Cheikh Nador, Hadj M’Rizek, et surtout son génie inventeur, El-Hadj M’hamed el-Anka surnommé « Le Cardinal″ qui a su le populariser et le faire connaitre au monde entier. Le Chaabi, littéralement « populaire″ est un genre musical authentique, hybride, mélange de classique andalou, de haouzi et Kabyle, né au début des années 1920 et qui a offert un patrimoine digne de ce nom à l’Algérie qui le lui rend bien à travers la générosité et l’accueil des habitants de la Casbah, citadelle de l’humanité. Aujourd’hui elle se trouve sur la liste du patrimoine de l’humanité de l’Organisation des nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco)
Une mise en relief, en effet, de la Casbah que l’on aborde sous tous ses aspects que l’on croyait connaître et qui pourtant se révèle pleine de surprise. Comme dans une carte postale que le touriste savourait le paysage où l’on se demande à chaque photo que l’on admire quel nouvel enchantement va soulever notre imagination… Car nos regards sont conçues comme un spectacle en décor « taille réelle » duquel surgissent des personnages incroyables, aux costumes somptueux, interprétés par « Ptit Moh » dont les spectateurs louent la disponibilité et l’énergie communicative.
En dépit de cette caution culturelle, on ne peut négliger l’auto signification du thème choisi dans <Casbah mon amour< qui suggère un artiste touche-à-tout capable de se frayer la voie au travers des circonstances adverses en étant l’homme à multiples facette ; et aussi, sur le plan de l’expression poétique, c’est lui qui a plusieurs cordes à son arc. « Ptit Moh″ est à la fois poète, compositeur et arrangeur, et en tant que tel, il a choisi de décloisonner l’art pour < le brasser< afin d’apporter une symphonie. C’est l’homme des mots, qui connaît les mots, aime les faire explorer et exploser à travers le Melhoun, et quand il monte sur ses chevaux déclamatoires, les Muses ont intérêt à se bien tenir.
Mokrane MAAMERI
