De son style pointillant, illustrant au plus près la vie sentimentale d’une femme belle et rebelle, l’écrivaine algérienne Maïssa Bey construit un roman enflammé, d’une audace formelle un monument aux femmes.
Romantiques, épiques ou légendaires, les romans de Maïssa Bey explorent volontiers les genres et les tonalités. Hizya (l’Aube, 2015) surprend une fois encore en jouant avec les codes de la mythologie. Raconté du point du point de vue d’une narratrice, coiffeuse hantée par la légende – qui cherche à utiliser l’image de Hizya, le récit joue avec un romantisme d’un bel éventail de situations à haute densité littéraires et donne au lecteur un miroir joyeux.
Le roman commence par la légende de Hizya. L’histoire d’une époustouflante femme décédée très jeune dans des circonstances non élucidé. Anéanti par le chagrin, son amoureux Sayed charge un poète de lui rendre un hommage par un poème pour exprimer le douleur qui l’habite. En effet, la figure de Hizya apparait en 1878 dans une célèbre élégie du célèbre poète Algérien Mohamed Ben Guittoun originaire de Biskra et mort à la fin du 19e Siècle, une élégie qui fera sa renommée dans le Sud constantinois, La figure de Hizya fait partie prenante du tiroir culturelle Algérienne, désormais .
Rendre à césar ce qui est à césar, voilà le génie de Maïssa Bey qui, à travers cette élégie, ressuscite la mythologie Algérienne en décrivant la situation actuelle des femmes qui continuent à faire face aux traditions séculaires des pères. Hizya, femme belle et rebelle, follement amoureuse de Sayed, elle décide contre vent et marée de s’unir à son amoureux. Mais un mois après le mariage, elle meurt (…)
Le personnage du roman de Maïssa Bey, certes ! belle mais pas que puisque instruite, cultivée et coiffeuse à ses heures libre. Impressionnée par la figure de Hizya, jusqu’à vouloir l’imiter voire lui ressembler et entre en émersion pour vivre une histoire d’amour tout feu tout flamme et séduire les hommes. La narratrice s’imagine alors comme une muse, cette Hizya que les hommes tentent d’approcher. Il s’agit d’un rêve d’une coiffeuse qui travaille dans un salon de coiffure ou d’un besoin radical née des ruines de la légende ? Ce rêve l’anime et illumine les chemins de son quotidien.
Et ce quotidien qu’elle menait train-train lui fait réaliser son rêve lorsqu’elle rencontre un garçon dans un coin de la rue. Ainsi commence des rencontres à peine initié en petite discussion, des mystères troublant que celui des saisons qui changent. Des mystères aussi simples, aussi pur que peut l’être l’âme d’une jeune fille. Et aussi grand que les cœurs peuvent le porter. Des mystères qui suscitent la jalousie d’autres hommes, ce qui lui fait énormément plaisir, puisque c’était son rêve. Mais un rêve à minima car la narratrice veut aller jusqu’au bout de sa quête, désobéir, parler, narguer le fil rouge qui se met à travers. Ainsi, commence pour elle les déboires, les descentes aux enfers: rébellion et interdits.
Par endroit, les gestes et faits de Hizya, dite Liza, sont relatés par un personnage présent et qui bouscule les lignes, il essaye de mettre des points sur les I entre fiction et réalité mais elle ne trouve que des questions (…)
Dans Hizya, les lieux sont emblématiques et parlant. La narratrice travaillant dans un salon de coiffure, un lieu où les femmes se réunissent pour causer, à la façon des femmes du 17e Siècle sous le règne de Louis XIV préparant le siècle de lumière avec la naissance d’un mouvement littéraire féminine assez controversés, celui de la « préciosité » qui trouvera sa place physique et littéraire dans les salons de coiffure. D’autant plus le salon que décrit l’auteure Maïssa Bey se situe à la Casbah, quartier d’Alger chargé d’histoire, aussi un quartier populaire et où la culture ancestral se transmet d’une génération à l’autre.
Le roman teinté de la littérature antique de la mythologie grec, l’auteure Maïssa Bey s’inspirant de la légende Hizya, décrit le combat des femmes qui luttent pour leur liberté et s’assumer d’elles-mêmes.
Par : Mokrane Maameri
Ecrivain