« Le rêve lointain et proche dans les yeux perdus des trois Algéroises, si nous tentons d’en saisir la nature : nostalgie ou douceur vague,
c’est pour, à partir de leur absence si manifeste, rêver à notre tour la sensualité. Comme si derrière ces corps et avant que la servante ne
laisse retomber le rideau, s’étalait un univers dans lequel, avant de s’asseoir devant nous, nous qui regardons, elles vivraient
continuellement. Car précisément, nous regardons. Dans la réalité, ce regard-là nous est interdit. Si le tableau de Delacroix inconsciemment fascine, ce n’est pas en fait pour cet Orient superficiel qu’il propose dans une pénombre de luxe et de silence, mais parce que, nous mettant devant ces femmes en position de regard, il nous rappelle qu’ordinairement nous n’en avons pas le droit. Ce tableau lui même est un regard volé. » Assia Djebar – Femmes d’Alger dans leur appartement
Bibliothèque Assia Djebar Paris : http://bib-assia-djebar.wixsite.com/bib-bazar
Amina HARITI